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Abir a de la classe. Elle connaît sa vocation, celle d'actrice. Donc, le soir elle répète dans les caves avec sa copine Safia. Avant ça, elles passent à l'Alim où Monsieur Achour leur file les fruits invendues. Et elle récite les textes, plus ou moins sérieusement. Parfois, après deux trois joints, Abir sanglote, elle joue, et les yeux de Safia brillent eux aussi. Puis Abir lui dit d'arrêter ses conneries, et elles rient. Dans les caves des Quartiers Nords de Bondy existe ainsi des moments paisibles et joyeux.

Mais, de temps en temps, l'humeur d'Abir est plus sombre. Au septième étage, elle essuie les larmes de sa mère. Naïm son frère est une nouvelle fois incarcérée. Elle subit alors les reproches destinés aux hommes absents. Mais elle ne dit rien, elle pleure vraiment, comme un barrage qui rompt. Cela déborde, son visage se tord dans des grimaces, et les larmes ruissèlent comme un fleuve infinie.

Après, Abir boit le thé à la menthe de sa mère, avec beaucoup de sucre, et elle fume une ou deux cigarettes à la fenêtre. Et quand y a pas de règlements de compte, elle regarde les gamins qui jouent au foot jusqu'à pas d'heure, les tantes qui crient depuis leur fenêtre, Monsieur Achour qui baisse le rideau de fer, et les potes de Naïm qui font des tours de quad. Et quand ça va vraiment pas, elle regarde au tour. Au tour, il y a les bâtiments défraichis et les blocs délabrés sois disant rénovés.

 

Et le coeur lacéré, les poings serrés, elle la sent à nouveau. Cette haine qui la fait vibrer. La misère a des visages, et c'est ceux des siens.

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